Apprendre en coopérant en CE1

Apprendre en coopérant en CE1

Apprendre en coopérant en CE1

Séverine Kastler, Béatrice Broggi, Anne Valentin
Apprendre autrement

L’expérience de ces deux classes de CE1, à l’école Ste Marthe, Institution Fénelon, à Grasse a commencé en Janvier. Béatrice Broggi et Séverine Kastler (enseignante ressource) souhaitaient vivre ces moments avec leurs deux classes et s’essayer à de nouveaux dispositifs, notamment la pédagogie coopérative à laquelle nous avons ajouté la touche “intelligences multiples”…. Quand tout est à créer, quel boulot !! Nous avons cogité, ciblé, lu et tenté !
Je leur laisse la parole. Vous verrez, elles sont prêtes à repartir !!

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Séverine, Béatrice, cette année, vous avez fait entrer la pédagogie coopérative dans vos classes. Quelles sont les raisons qui vous ont motivé à faire cette expérience ? Et en quoi consistait-elle ?

Séverine : Tout a commencé en décembre, j’ai appelé Anne à la rescousse pour un regard neuf sur des enfants en difficulté et elle m’a dit : “la coopération, c’est l’avenir !”
Cette petite phrase a fait tilt et j’ai commencé à m’interroger : comment aider les enfants à apprendre vraiment ? Comment les préparer à la société de demain en les rendant plus solidaires et moins individualistes ?
J’ai donc lu des présentations, des séquences proposées … Pour essayer de comprendre la coopération, comment la différencier du travail de groupe ordinaire, comment la mettre en œuvre?
En janvier nous nous sommes lancées, heureusement à 2 et avec Beatrice nous avons ainsi pu confronter nos expériences.
Avec l’idée et l’envie de mieux gérer l’hétérogénéité de la classe,  j’ai eu envie d’essayer une autre forme d’échanges avec les élèves et de pouvoir échanger autour de cette expérience avec d’autres pour cheminer ensemble et discuter des réussites et des échecs.
J’ai mis en place 5 séances et j’ai bougé les tables pour regrouper les enfants en îlots hétérogènes:
Une activité ludique avec des groupes de couleur à reconstituer sans connaître sa couleur, et sans parler.
Une activité de géométrie sur l’orientation spatiale,
Une activité sur l’accord au sein des groupes nominaux,tableauclassesgramm
Des jeux de conjugaison sur le présent de l’indicatif, une activité sur l’accord sujet/verbe.

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 💡 Il est très difficile pour les élèves de passer du verbe à l’infinitif (nous disons le verbe en pyjama, celui qui n’a pas encore rencontré ses amis pronoms et qui ne sait pas quel temps il fait pour pouvoir choisir son costume) au verbe conjugué. Nous avons utilisé la paire de ciseaux pour que les enfants fassent vraiment l’opération d’enlever la marque de l’infinitif avant d’écrire la terminaison (d’habiller le verbe !). L’utilisation du “kinesthésique” nous a paru très positif. 
À chaque fois,  j’ai tenté de respecter les consignes d’un travail de coopération: un travail à 4 où chacun a un rôle (responsable du temps, du matériel, harmonisateur, vérificateur, facilitateur, intermédiaire)facilitateurrole à assumer et où chacun apporte sa partie pour répondre à la question posée pour que dans chaque groupe les enfants dépendent des uns des autres, une évaluation individuelle en fin de séance pour que chacun exprime son opinion selon les critères de réussite donnés au départ.responsablematériel

 

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Les élèves s’évaluent sur les habiletés
coopératives qu’ils estiment avoir mises en oeuvre pendant l’activité.

 

la-cooperation-au-fil-des-jours-des-outils-poBéatriceLise Desrosiers parle en préambule dans BOUBA de la pédagogie coopérative qui se pratique au Québec. Elle ne développe pas le sujet mais utilise quelques principes dans sa méthode. Puis Anne, tu nous en as parlé et conseillé la lecture de “La coopération au fil des jours” de Jim Howden. J’ai lu et je me suis dit que c’était l’avenir et que notre responsabilité était aussi de faire passer des valeurs de coopération pour lutter, un peu, contre ce monde individualiste. De plus, apprendre à des enfants est pour moi une chose difficile au regard de leurs multiples profils. La pédagogie coopérative est une possibilité de faire autrement qui m’a tentée.

Les rôles dans le groupe de base, dans la classe de Béa (trouvés en coopération, bien sûr)

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Avez-vous constaté un changement du climat de vos classes ? Si oui, comment s’est-il manifesté ?

Béatrice : Oui le climat de la classe a changé. Les enfants très individualistes ont accepté l’aide des autres. Aider les autres est toujours valorisant et apprécié des enfants en général. Désormais, les enfants demandent à travailler en coopération. Cela les a rapprochés. La classe est plus soudée.

Séverine : Dans la classe, un climat d’échanges et d’esprit d’équipe s’est développé avec surtout une entraide spontanée.
Des enfants scolairement et socialement en échec ont pu trouver une place dans un plus petit groupe que dans le groupe classe.
Des enfants timides ou peu confiants ont osé dire qu’ils ne comprenaient pas et ont dû prendre des décisions, assumer leur rôle , justifier leur choix… Même si cela n’a pas binomes3toujours été facile.
Aucun enfant n’a été mis à l’écart et ils sont même devenus plus autonomes, moins dépendant de mon avis pour chercher et proposer des solutions.

 

 

 

 

Et sur le plan des apprentissages ? Des modifications constatées ?

Béatrice : Ce sont les enfants en difficulté qui ont, me semble-t-il, le plus bénéficié de ce travail car ils ont pu apporter aux autres. C’est très efficace pour améliorer leur estime de soi et les faire renouer avec les apprentissages.

Séverine : C’est très intéressant de les écouter être acteurs de leur apprentissage. Leurs explications, leurs justifications m’ont permis de voir plus facilement ou plus réellement les réussites, les acquisitions sûres comme les difficultés encore persistantes.
Ils ont réellement dû utiliser leurs outils: affichage, porte-vues de leçons…
La reformulation des savoirs par les enfants eux-mêmes a été très intense, ils interrogent leurs savoirs et les confrontent.

Et quel bilan ? Quelles perspectives ?

Séverine : Bilan positif. Beaucoup de préparation pour que les enfants soient autonomes le jour j et moi aussi, pour être vraiment à l’écoute et non parasitée par des difficultés matérielles.
J’étais plus disponible aux enfants en difficulté sans leur donner l’impression qu’ils étaient marginalisés vis-à-vis du groupe.
Je cherche encore des solutions pour limiter le niveau sonore : les enfants parlent du sujet mais très fort ! Il y a aussi la définition des rôles qui demandent une bonne compréhension par tous,  moi comme eux.
Je pense commencer dès le début d’année pour apprendre aux enfants à coopérer tout de suite. Je suis intéressée par “une Coop du matin” coopdumatinqui permettrait d’aider les enfants à entrer dans le travail plus vite en réalisant un mini-challenge à 4 en autonomie.tableaucoopdumatin
J’ai aussi un projet de rallye lecture coopératif (et ici, pour des matrices de questionnaires très bien faites) et bien sûr je voudrais reprendre le travail sur le groupe nominal qui a été très intéressant.
La méthode de lecture canadienne Bouba et le cap maths que nous utilisons sont tout à fait en adéquation avec la coopération. Et Béatrice d’ajouter : Dans tous les cas, je recommence l’année prochaine en proposant aux enfants des séances quotidiennes de courtes durées et des séances plus longues 1 ou 2 fois par semaine. Nous pourrions travailler en coopération sur un rallye lecture et refaire des séances de grammairetableauclassegramcomplet et puis tout est possible …maths, sciences…

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Des conseils à donner ?

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Séverine : Se lancer est intéressant, cela permet de s’ouvrir à de nouvelles pédagogie sans abandonner les autres bien sûr. Et je suis persuadée que ça prépare les enfants à la société de demain.Il faut beaucoup travailler et lire en amont sur la méthode pour bien l’intégrer, la lecture de la coopération au fil des jours de Jim Howden est indispensable.
Je suis prête à échanger avec d’autres car cette démarche s’applique de la maternelle
au Lycée !
Béatrice rajoute : Je conseillerais aux collègues qui veulent se lancer de se former et de commencer par la lecture du livre de Jim Howden (et celui de Sylvain Connac)couverture-s-connac et puis de se lancer en début d’année. L’idéal serait de ne pas se lancer seule. Les échanges sont tellement enrichissants. Je leur dirais que ce n’est pas du travail en plus mais du travail autrement.

“Compte-tenu de la diversité et du pluralisme d’une équipe (ou d’une classe, il n’est pas demandé la même chose à tout le monde, mais à tout le monde, il est demandé quelque chose”… (CNP, mars 2001, je l’ai un peu modifiée pour l’adapter !!)

Pour approfondir ...

Une vidéo très intéressante “Les maths ensemble”

Une interview de Sylvain Connac, texte à télécharger : peda coop apprendre avec

Un memento pour la coopération entre élèves au collège et au lycée, à télécharger  memento_pour_la_cooperation_entre_eleves

Et pour celles et ceux qui ont fait le niveau 1 de formation cette année 2015/2016, avec Jim Howden, guettez bien le catalogue des formations diocésaines pour l’an prochain…
Niveau 2 programmé !

 

2 commentaires

  1. Marie-Gabrielle DI NUNZIO

    Merci pour votre article et votre enthousiasme. Je suis convaincue que les enfants qui développent leurs aptitudes de coopération à l’école auront une vie professionnelle plus créative et de meilleures relations interpersonnelles … l’Avenir pour un “Mieux Etre” au travail et dans la vie privée !
    Nous, adultes, gagnons à ré-apprendre la coopération, la créativité, le plaisir …pour faire contrepoids avec l’esprit de compétition dans le monde du travail. Je souhaite que le partage de votre expérience fasse des émules tant sur le plan des modes d’apprentissage que de l’état d’esprit.

    Répondre
  2. Vanessa Carinci , professeure de français et personne ressource du collège Fénelon

    Bravo les filles ! Continuez à travailler avec autant de passion et d’enthousiasme pour aider tous les élèves.

    Répondre

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